L’aide à l’UNWRA ne doit pas s’arrêter !
Categories: Droit international, Réfugiés palestiniens
La décision d'au moins 9 pays donateurs de suspendre le financement de l'Office de secours et de travaux des Nations unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient (UNRWA), à la suite d'allégations selon lesquelles des membres du personnel auraient été impliqués dans les attentats du 7 octobre 2023 dans le sud d'Israël, va porter un coup dévastateur à plus de deux millions de réfugié·e·s de la bande de Gaza occupée, pour lesquel·le·s l'organisation est la seule bouée de sauvetage. Amnesty International exhorte les États à revenir sur leurs décisions et à ne pas suspendre le financement de l'UNRWA.
Le dossier transmis par Israël aux États-Unis a fait l'effet d'une bombe. Selon les éléments qu'il contient, au moins 12 membres du personnel de l'UNRWA auraient été impliqués dans les attentats perpétrés par le Hamas le 7 octobre dernier en Israël. L'agence d'aide onusienne a immédiatement licencié neuf employés à la suite de ces allégations et a ouvert une enquête.
« Il est choquant, voire inhumain, que plusieurs gouvernements aient pris des décisions qui vont aggraver les souffrances de deux millions de Palestinien·ne·s, déjà confronté·e·s au risque d'un génocide et d'une famine, quelques jours seulement après que la Cour internationale de justice a conclu, dans un arrêt, que la survie des habitant·e·s de Gaza était menacée. Il est particulièrement inadmissible que de telles mesures aient été prises à la suite d'allégations concernant 12 employé·e·s sur les 30 000 que compte l'UNRWA », a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d'Amnesty International.
« Les allégations concernant l'implication de membres du personnel de l'UNRWA dans les attentats du 7 octobre sont sérieuses et doivent faire l'objet d'une enquête indépendante ; toute personne contre laquelle il existe des preuves suffisantes et recevables doit être poursuivie dans le cadre d’un procès équitable. Mais les actions présumées de quelques individus ne doivent pas servir de prétexte pour interrompre une assistance vitale dans le cadre de ce qui pourrait s'apparenter à une punition collective. »
Le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Italie, les Pays-Bas, le Japon et la Finlande se sont joints aux États-Unis, à l'Australie et au Canada pour suspendre le financement de l'agence d'aide. En Suisse le Département fédéral des affaires étrangères a indiqué que les contributions à l'UNRWA qui n'ont pas encore été versées, ne le seraient que lorsqu'il disposerait de plus d'informations sur ces graves allégations. Ensemble, ces pays ont fourni plus de la moitié du budget de l'UNRWA en 2022.
Alors qu'Israël, la puissance occupante, continue de violer de manière flagrante ses obligations à l'égard des réfugié·e·s palestinien·ne·s à Gaza et dans le reste des territoires palestiniens occupés, l'UNRWA est depuis longtemps la seule bouée de sauvetage, offrant l'aide humanitaire indispensable, l'éducation et le logement. L'agence fournit également une aide indispensable à des millions d'autres réfugié·e·s palestinien·ne·s vivant dans les pays arabes voisins.
La Norvège, l'Espagne, l'Irlande et la Belgique font partie des États qui ont annoncé qu'ils ne suspendraient pas leur financement, reconnaissant le rôle vital que l'UNRWA continue de jouer dans la distribution de l'aide humanitaire à ceux qui en ont désespérément besoin.
« Il est scandaleux qu'au lieu de tenir compte de l'arrêt de la CIJ et de la conclusion de la Cour selon laquelle la situation humanitaire catastrophique dans la bande de Gaza risque fort de se détériorer davantage, des États clés, dont les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Australie et la France, aient interrompu le financement du principal fournisseur d'aide aux civils de Gaza », a déclaré Agnès Callamard.
« Tous les États ont clairement le devoir de veiller à ce que les mesures de la CIJ soient mises en œuvre, y compris celles qui ordonnent à Israël de prendre des mesures immédiates et efficaces pour garantir la fourniture d'une assistance humanitaire aux civils palestiniens de Gaza, ce qui constitue une étape essentielle pour prévenir un génocide et d'autres dommages irréparables », a déclaré Agnès Callamard.
Deux poids deux mesures
Certains des gouvernements qui ont annoncé qu'ils allaient supprimer les fonds destinés à l'UNRWA en raison de ces allégations ont, dans le même temps, continué à armer les forces israéliennes malgré les preuves accablantes que ces armes sont utilisées pour commettre des crimes de guerre et de graves violations des droits humains. « S'empresser de geler les fonds destinés à l'aide humanitaire, sur la base d'allégations qui font encore l'objet d'une enquête, tout en refusant d'envisager de suspendre le soutien à l'armée israélienne est un exemple flagrant de deux poids deux mesures », a déclaré Agnès Callamard.
« Au lieu de suspendre un financement vital pour ceux qui sont dans le besoin, les États devraient s'efforcer de mettre un terme aux transferts d'armes vers Israël et les groupes armés palestiniens et faire pression pour un cessez-le-feu immédiat et durable et un accès humanitaire total afin d'aider à soulager les souffrances dévastatrices. »
Communiqué de presse publié le 30 janvier 2024